Lieux de souvenirs. Triptyque.
Triptyque
« Carrefour », dans la banlieue de Montélimar. Un samedi après-midi. C’est la cohue. Forcément, c’est tellement petit, tout le monde se monte dessus, une veille de Noël. C’est le 6ème Père Noël que je vois de la journée. Je commence à me poser des questions. Les dames des caisses sont surchargées de travail. J’en vois même une qui engueule un client : « Maman, pourquoi elle crie la dame ? » « Ta gueule et avance ! On n’a pas que ça à foutre ! ». J’évite la torgnole. Les guirlandes au dessus de ma tête me donnent la nausée. On me bouscule, j’y vois rien, du moins rien au dessus d’1,20 mètre. Puis, tout à coup, tout le monde se met à crier, en même temps. Tout le monde cours, dans la même direction, en même temps. Je tombe à terre, j’évite les semelles. Un coup de feu. Trou noir.
Voiles, draps et baldaquin
Conte de fée, fleurs et parfums
Nous deux, dans ce halo de lumière
Nous deux, seuls en plein désert
La bougie répand son bonheur
Comme une onde qui nous enivre
Saoulés l’un de l’autre en cette heure
A jamais, cela nous fait vivre
Clair espoir, je ne rêve point
Non, que l’on ne me réponde pas
Je n’oublierai pas que lorsque tu es là
L’ivresse absolue n’échappe pas à mes mains
Nuit enchantée, ne cesse pas de sublimer
Chaque moment où les heures sont des minutes
Comme dans tes bras je me sens m’oublier
Happé dans une abysse, interminable chute.
La ferme du Périgord. La grange toujours vide ou presque. Mon
château. Le refuge de mes croisades. La vieille cabane, au bout de l’échelle.
L’odeur du foin encore présente alors qu’il n’y en a plus depuis des siècles.
Les hirondelles bâtisseuses, seules habitantes à temps plein. Les nuits d’été,
les soirs d’hiver. La lanterne inutilisée, inutilisable. Les fers à cheval.
Les matins de pluie, où le chagrin de mes grands-parents à
peine disparus se matérialise enfin. La tristesse enfermée dans certains cœurs
ressurgit. On n’oublie pas les présences. Les absents ne sont pas morts. Au
contraire ils sont là, dégoulinant et se mêlant à mes larmes. Ils s’immiscent
en moi, dans ma bouche, s’imbibant dans mes vêtements. Je suis eux à présent et
ils me donnent ce qu’ils leur restaient à m’offrir. Et je les reçois avec tout
l’honneur qu’il se doit. A vous, merci.